Les actes respectueux pour les « majeurs » appelés « sommations respectueuses » puis « notifications »
Le pacte de mariage et « la parole du futur »
Les dispenses de consanguinité droit canon, droit civil…et l’implexe
Evocation du régime matrimonial soumis à la coutume normande
Les différents âges de la majorité
Dans beaucoup d'actes on lit "majeur" ou "non majeur". La majorité qui consiste à cesser d'être sous l'autorité paternelle ou sous la tutelle, à pouvoir administrer seul ses biens personnels, à en disposer, et à faire tous les actes de la vie civile ! ?, Mais, l’âge de la majorité pouvait varier selon les actes. Par exemple, la majorité requise pour contracter un engagement volontaire dans l'armée sans le consentement des père, mère ou tuteur était de 20 ans (Loi du 27.07.1827, art. 46,6°).
La majorité politique est fixée à 21 ans (Loi du 5 avril 1884, art.14). Cet âge a été adopté pour la majorité civile par la Belgique, l'Italie, l'Allemagne, et la Russie. Pour l'Angleterre et les Etats Unis, à 22 ans; pour l'Autriche, à 24 ans.
Périodes
Hommes
Femmes
de Février 1556 à 1792 * **
30 ans
25 ans
de 1792 à l'An XII (1803)
21 ans
21 ans
de 1804 à 1907
25 ans
21 ans
de 1907 à 1974
21 ans
21 ans
depuis le 05.07.1974
18 ans
18 ans
* Toutefois le mariage était possible à partir de 14 ans pour les garçons et de 12 ans pour les filles ( avec l'autorisation parentale.
** Le mariage émancipe, si bien qu’il n’est pas nécessaire d’obtenir l’autorisation des parents en cas de remariage, même à moins de 25 ou 30 ans.
Les militaires doivent absolument présenter, lors des épousailles, un « certificat de consentement » du capitaine.
Le consentement parental pour les enfants mineurs
Selon les articles 151 à 155 du Code civil, pris en leur rédaction d’origine, les enfants mineurs (voir tableau selon les périodes ) devaient obtenir le consentement parental pour contracter mariage. A noter que le consentement est donné sans forme particulière lorsque le (ou les) parent assiste à la célébration du mariage ou par acte authentique passé devant notaire lorsqu’il est absent ; dans ce cas, la minute de l’acte est conservé par le notaire. Mariage des mineurs dont les parents sont décédés
En 1882-1883, les règles applicables en matière de consentement au mariage, lorsque les deux parents de l’un des deux époux étaient décédés, étaient prévus dans les articles 150 et 160 du code civil. Article 150 : Si le père et la mère sont morts ou s’ils sont dans l’impossibilité de manifester leur volonté, les aïeuls et les aïeules les remplacent ; s’il y a désaccord entre l’aïeul et l’aïeule de la même ligne, il suffit du consentement de l’aïeul. S’il y a dissentiment entre les deux lignes, ce partage emporte consentement. Article 160 : S’il n’y a ni père, ni mère, ni aïeuls, ni aïeules, ou s’ils sont dans l’impossibilité de manifester leur volonté, les fils ou filles mineurs de vingt et un ans ne peuvent contracter mariage sans le consentement du Conseil de Famille. Ainsi lorsqu’il existe un aïeul, et même si, par ailleurs, le mineur est placé sous le régime de la tutelle, le consentement est donné sans forme particulière lorsque cet ascendant assiste à la célébration du mariage ou par acte authentique passé devant notaire lorsqu’il est absent ; dans ce cas, la minute de l’acte est conservé par le notaire.
Si le ‘ou la) futur(e) époux(se) n’a aucun ascendant, le consentement est donné après délibération du Conseil de Famille convoqué et présidé par le Juge de Paix du domicile de la mineure, c’est à dire du domicile qu’avait le père du (de la) mineur au moment du décès. Il existe, en principe, un Juge de Paix par canton. Les procès verbaux des délibérations des Conseils des Familles sont versés aux archives départementales (série U) et sont conservés définitivement. Comme la plupart des archives judiciaires, ces documents sont classés par ordre chronologique. (Les archives des justices sont inexistantes pour Saint James, incomplètes pour Ducey).
Extrait de la Revue Généalogique Normande n° 34/1990 p 151
Les actes respectueux pour les « majeurs » appelés « sommations respectueuses » puis « notifications »
Au delà de l’âge de la majorité matrimoniale ( articles 151 à 155 du code civil), l’enfant majeur devait consulter ses père et mère (ou aïeuls et aïeules si décès ou incapacité des parents), les parents peuvent approuver sans aucune formalité ( d’où « présent et consentant » dans les actes de mariage). Par contre, si l’un d’eux refusait son consentement, le fils ou la fille demandait conseil par acte respectueux dressé devant notaire, étant précisé qu’il pouvait alors passer outre à un refus. Conséquences éventuelles : Ils peuvent être « exhérédés » et exclus des successions de leurs parents qui, en outre, peuvent révoquer les donations et avantages qu’ils auraient fait. Dans les faits, ces sanctions sont laissées à l’appréciation des parents et, le cas échéant, soumises au contrôle du juge. (Page 272 Revue Généalogique Normande n°67/1998)
En Normandie a été adoptée une pratique selon laquelle les sommations respectueuses sont faites sans autorisation du juge, par deux notaires ou par un notaire et deux témoins ; elles sont délivrées (renouvelées ) trois fois.
Par un arrêt de règlement du 27 août 1692, seul le parlement de Paris a créé une procédure : les fils et les filles ou veuves qui veulent sommer leurs pères et mères de consentir à leur mariage sont tenus de demander permission aux juges royaux et de faire faire des sommations par deux notaires à Paris et par un notaire et deux témoins dans le reste du ressort du Parlement de Paris.
Page 272 Revue Généalogique Normande 67/1998
L’exigence des actes respectueux, dénommés « sommations respectueuses » sous l’ancien droit, se justifie par le principe selon lequel les enfants doivent, à tout âge, honneur et respect à leurs parents. C’est pourquoi l’enfant manquerait à ce devoir s’il ne prenait, préalablement au mariage projeté, le conseil de ses parents qui, le cas échéant, pour des considérations familiales, religieuses, morales, pécuniaires ou autres, pourront le détourner d’une union déraisonnable. Passer outre était possible mais souvent, pas sans conséquences :
ci-dessous, les commentaires C Demolombe Cours de code civil, Paris 1846…
"…il peut être très utile de d’accorder aux descendants le droit, non plus d’empêcher le mariage, mais d’en détourner les enfants par la voie des exhortations et des remontrances. Tel est le but des actes respectueux par lesquels les enfants sont tenus de demander le conseil de leurs ascendants , espèce de transaction qui maintient tout à la fois dans une salutaire mesure l’autorité paternelle et la capacité absolue désormais acquise à l’enfant. La nécessité de ces actes, consacrée depuis longtemps dans notre ancien droit, notamment par l’édit du mois de février 1556, par la déclaration du 26 novembre 1639, par un arrêt du règlement du 26 novembre 1692, et par un édit du mois de novembre 1697( Pothier n°337), avait été supprimée par la loi intermédiaire du 20 septembre 1792 ( tit. IV, sect. 1re), conforme en ce point à la législation anglaise, qui n’exige en effet aucune condition de ce genre.
Depuis 1804 la formalité acte respectueux été progressivement assouplie et supprimée. D’abord, le nombre des acte respectueux a été réduit et dans tous les cas ramené à un par la loi du 20 juin 1896. Ensuite, l’âge de la majorité est passé à vingt et un ans par la loi du 21 juin 1907 ; ce texte supprima les acte respectueux , devenus notifications, pour les époux ayant atteint 30 ans, puis 25 ans en vertu de la loi du 28 avril 1922 ; la formalité fut abolie par la loi du 2 février 1933."
Revue Généalogique Normande n° 42/1992
Le pacte de mariage et « la parole du futur »
Dès que les jeunes gens ont décidé de s’épouser ou que leurs parents ont décidé pour eux…on se rend chez le notaire pour lui faire rédiger un pacte de mariage ( on trouve dans les vieux registres des tabellions normands le terme de « paction ») qui a été longtemps et souvent âprement discuté entre les pères des futurs époux. Jusqu’à la fin du XVIe siècle on trouvait une formule telle que celle-ci : « en vue du mariage qui doit être contracté par paroles de futur et après fiançailles entre ….et …solennisé ledit mariage en sainte mère église catholique apostolique et romaine à la première réquisition qui, par l’une des parties sera faite à l’autre ». Cette parole du futur (verba futura) autorisait les fiancés à cohabiter dès la signature du contrat. Le concile de trente, qui se termina en 1563, réagit vigoureusement contre cette pratique solidement établie et ordonna que la cohabitation ne soit effective qu’après le mariage religieux et déclara nulles les paroles de futur qui furent d’ailleurs prohibées ensuite par ordonnance royale.
Mais les habitudes bien ancrées ne les firent disparaître que bien longtemps plus tard ( dans le Rouergue on en trouve en 1675 )
La Pratique de Ferrière nous donne les cinq conditions édictées par le Droit Canon pour la validité d’un mariage qui est, dit-il : « un contrat civil élevé à la dignité de sacrement par lequel l’homme et la femme sont joints d’un lien indissoluble, qui ne peut se dissoudre que par la mort de l’un d’eux »
Le consentement des père et mère ou des tuteurs pour les enfants mineurs
La proclamation de trois bans faites les dimanches et jours de fête dans la paroisse de chacun des conjoints
La présence de quatre témoins qui doivent certifier bien connaître les futurs époux
La bénédiction nuptiale doit être donnée par le curé ou le vicaire de la paroisse de l’un des conjoints. Ceux-ci doivent justifier du temps suffisant pour acquérir domicile dans leur paroisse : six mois si la personne était domiciliée auparavant dans une paroisse du même diocèse, ou un an si elle vient d’un autre diocèse
Qu’il n’y ait aucun empêchement qui en causerait la nullité
Le Mariage avait lieu généralement dans la paroisse où habitait la jeune fille. Si un acte mentionne une dispense de temps, c’est que celle-ci vit dans la localité depuis peu, il est alors inutile de chercher son acte de naissance ou le mariage de ses parents sur cette commune, mais il sera peut-être noté d’où elle est originaire sur l’acte de mariage.
Les dispenses de consanguinité droit canon, droit civil…et l’implexe
Elles sont nombreuses, mais ne sont pas gratuites. Ainsi, la consanguinité s’étendait même aux liens par alliance ! Un garçon épouse une fille, et peu de temps après, la sœur de l’un épouse le frère de l’autre…il fallait une dispense car les liens créés par le premier mariage ( beaux-frères, belles-sœurs)étaient considérés comme des liens de parenté proches.
A partir d’un texte de François Boismard publié dans la revue généalogique normande n° 47/1993 :
En Vendée ou dans le Rouergue, par exemple, il est fréquent de trouver plusieurs frères et sœurs qui se marient le même jour avec leurs beaux-frères et belles-sœurs…ils ne font aucune demande de dispense puisqu’il n’existe aucun lien de parenté entre eux au moment du mariage !.
En droit canonique (droit religieux), on calcule les degrés en comptant le nombre de générations jusqu'à l'ancêtre commun
L'église catholique interdisait les mariages consanguins, c'est à dire entre époux ayant un ancêtre commun, jusqu'au 6ème degré. Les mariages consanguins de degré inférieur au 5 étaient entachés de nullité si on découvrait la consanguinité après la célébration. Cette règle explique qu'on peut trouver le mariage des mêmes personnes enregistré 2 fois à quelques mois d'intervalle.
Par exemple, dans le tableau ci-dessus, A est séparé de C par 2 génération et B l'est par 3 générations. On dira donc en droit canonique que A et B ont une consanguinité du 2ème degré au 3ème degré (ou plus simplement du 2 au 3).Notons qu'en cas de consanguinité au 2ème degré (cousins germains) ou même du 1 au 2 (oncle - nièce ou tante - neveu), c'est à Rome qu'il faut demander la dispense pour mariage consanguin (et c'est plus cher)!
Les empêchements
Il y a autant d’empêchements distincts qu’il y a de souches communes parmi les ancêtres des deux futurs. On rencontre ces souches communes en 3 cas principaux.
Lorsque dans l’ascendance des futurs, il y a déjà eu mariage entre parents après dispense
Lorsque dans l’ascendance des futurs, il y a eu mariage de personnes parentes entre elles avec des personnes qui étaient également parentes entre elles
Lorsqu’un ancêtre commun a épousé successivement des personnes parentes entre elles
L’empêchement s’étend :
En ligne directe à l’infini.
En ligne collatérale, jusqu’au 3e degré inclusivement.
En droit civil (droit de l'état), on compte les degrés de consanguinité différemment. En partant d'un des (futurs) époux, on remonte jusqu'à l'ancêtre commun, puis on redescend jusqu'à l'autre époux en comptant le nombre de générations traversées. Dans les exemples ci-dessus, A et B ont une consanguinité au 5ème degré. En droit civil, ces liens de parenté ne constituent pas un empêchement : seuls les mariages entre ascendants et descendants directs et entre frère et sœur sont interdits
« l’implexe » est une conséquence de l'existence de mariages consanguins. Pour le généalogiste, il correspond au fait qu'on se trouvera moins d'ancêtres que le nombre théorique puisque certains sont communs aux deux époux dans un couple. Dans une société où la mobilité géographique n'était pas très importante, le nombre des mariages consanguins (selon la définition de l'église catholique) était forcément relativement important et les dispenses constituaient une source de revenu non négligeable pour l'église catholique. Fort heureusement, les généalogistes peuvent aussi retirer les fruits de l'existence de ces dispenses puisque les dossiers de demandes de dispense pour mariage sont une source de renseignements intéressante. En effet les dossiers donnent souvent la filiation des deux époux jusqu'à l'ancêtre commun.
Evocation du régime matrimonial soumis à la coutume normande
Le statut des époux normands, marqués par les principes de la conservation des biens dans les familles et de l’infériorité de la femme vis à vis de son mari, se distingue des régimes appliqués dans les autres régions de l’ancienne France.
Il exclut toute communauté entre époux et diffère nettement du régime dotal institué par le code civil de 1804, supprimé en 1965.
A ce sujet, voici l’Article 389 de la coutume de 1583, (fidèle au Grand Coutumier de Normandie) : « Les personnes conjointes par mariage ne sont communes en biens, soit meubles ou conquêts* immeubles ;ainsi les femmes n’y ont rien qu’après la mort du mari ».)
* immeubles acquis par l’époux pendant la durée du mariage (les immeubles acquis à titre onéreux ou gratuit avant le mariage forment les acquêts. L’article 330 interdit que, par contrat de mariage, il soit dérogé à cette règle.
Et l’article 410 de la coutume : « gens mariez ne se peuvent céder, donner ou transporter l’un et l’autre quelque chose que ce soit, ni faire contrats ou concessions par lesquels les biens de l’un viennent à l’autre, en tout ou partie, directement ou indirectement »
Tout en respectant ces règles, le contrat de mariage est rédigé, soit en acte authentique devant notaire, soit sous seing privé * (ssp )en la présence obligatoire des parents des futurs époux.
Les formes et les nombreuses clauses du contrat, telles : le préambule, le douaire coutumier de l’épouse, la dot et le don mobil, la clause de remport, et l’incapacité velléienne de la femme normande (acte du Sénat Romain) sont développées dans la Revue Généalogique Normande n° 54 et 55 en 1995, article d’une dizaine de pages signé François Grandpierre « Le statut des époux soumis à la Coutume Normande »
du même auteur, voir également le N° 52 page 386 sur la séparation civile dans l’ancien droit.
* ssp C’est la raison pour laquelle nous ne trouvons pas certains contrats de nos ancêtres bien que nous ayons la certitude de leur existence, principalement à travers les inventaires après décès. Par contre, un contrat sous seing privé était souvent déposé au rang de minute chez le notaire à la naissance du premier enfant ou, plus tard, avant son mariage pour des motifs essentiellement financiers, en vertu des accords passés, c’était l’événement qui déclenchait tout ou partie du paiement de la dot. ( bien noter la dates ssp de l’acte)